LaScalaParis

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10 02/2022

 « 1h22 avant la fin », théâtre sur le fil | Les Echos 10_02_22

jeudi 10 février 2022|Catégories: Spectacle Vivant|Mots-clés: |

Le tandem attachant formé par Kyan Khojandi et Eric Elmosnino se joue d’un texte à double sens signé Matthieu Delaporte. Lequel retrouve Alexandre De La Patellière à la mise en scène. « 1h22 avant la fin » ou le rire au bord du précipice, à la Scala Paris.

Face à Eric Elmosnino, parfait en grand faucheur bougon, Kyan Khojandi est la belle surprise de la représentation. (©Pascal Gély / Hans Luca)

Par Philippe Noisette – Publié le 10 févr. 2022 à 17:00

Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière s’étaient fait un nom au théâtre avec… « Le Prénom ». Le film éponyme qu’ils cosignèrent par la suite n’a pas complètement éloigné le duo des scènes. « Tout ce que vous voulez », autre succès, puis l’adaptation de « Par le bout du nez » en témoignent.

En ce début d’année, Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière signent leur première mise en scène, « 1h22 avant la fin ». La pièce, écrite par Delaporte, surprend par ses thèmes : moderne solitude, suicide possible, doute existentiel. Cela fait beaucoup pour une seule soirée. D’ailleurs, l’action se cherche un rythme dès le départ. La faute au visiteur, Eric Elmosnino, flingue en main, surprenant Kyan Khojandi et ses pensées morbides. On comprend vite qu’Elmosnino est la Mort. « Comme Mort Schuman ? » s’étonne Khojandi dans un savoureux numéro de devinettes.

« 1h22 avant la fin » va se jouer sur un fil, entre humour noir et révélation métaphysique sans jamais glorifier le suicide. La partition est ténue, mais le résultat n’est pas sans charme.

Ni répliques bien senties. Lorsqu’on lui demande sa dernière volonté, Kyan Khojandi ose un « gilet pare-balles » faisant rire la salle qui jusque-là ne savait pas trop sur quel pied danser.

Se dessine en creux le portrait d’un homme seul, même pas à la hauteur de ses illusions.

Son intérieur, déclinaison de tons marron, est seulement relevé par une sono imposante. Lorsque le dialogue s’installe tant bien que mal entre les protagonistes, c’est un festival de non-sens. Les paroles de chansons populaires semblent alors l’ultime refuge d’un Khojandi en roue libre.

Répliques millimétrées

Face à Eric Elmosnino, parfait en grand faucheur bougon, Kyan Khojandi est la belle surprise de la représentation. Plus connu pour la série « Bref », des one man shows ou ses rôles au cinéma, il se révèle ici un comédien tout en nuances.

Un troisième personnage, la voisine du dessus interprétée par Adèle Simphal, est moins convaincant. A ce moment-là, « 1h22 avant la fin » frôle la bluette un peu terne. Matthieu Delaporte cherchait sans doute un happy end, cette fin « heureuse » à l’américaine. On lui préférera le couple Khojandi / Elmosnino et ses répliques millimétrées. Et si au final l’espoir reste mince, le théâtre nous dit qu’il faut toujours y croire.

1H22 AVANT LA FIN

THéâtre

de Matthieu Delaporte

Mis en scène par Matthieu Delaporte et Alexandre de La Patellière

La Scala, Paris

www.lascala-paris.com

Jusqu’au 31 mars

Philippe Noisette

1 06/2021

Goldoni frénésie au Théâtre de Nice | Les Échos- 31_05_21

mardi 1 juin 2021|Catégories: Spectacle Vivant|Mots-clés: |

Goldoni frénésie au Théâtre de Nice

Le « Feuilleton Goldoni » créé en cette fin de (fausse) saison par Muriel Mayette-Holtz au Théâtre national de Nice est un beau précipité de drôlerie et de mélancolie. En trois fois 1 h 20, « Les Aventures de Zelinda et Lindoro » font un sort à l’amour jaloux, portées par le couple explosif Joséphine de Meaux et Félicien Juttner. Un spectacle à découvrir en tournée à la rentrée.

Lindoro (Félicien Juttner) et Zelinda (Joséphine de Meaux), le patriarche Don Roberto (Charlie Dupont) et son épouse Eleonora (Tania Garbarski). (©Virginie_Lançon)

Par Philippe Chevilley

Publié le 31 mai 2021 à 17:00

Embarquement pour Cythère au Théâtre national de Nice… mais attention, la traversée sera mouvementée. Car c’est l’amour jaloux qui est au centre des « Aventures de Zelinda et Lindoro », le « Feuilleton Goldoni » créé par Muriel Mayette-Holz pour la réouverture de son théâtre (du 20 au 29 mai). Cette trilogie de plus de quatre heures va voyager beaucoup lors de la rentrée prochaine (Paris, Toulouse, Toulon, Liège, Aix, Marseille…) pour la plus grande joie du public. Car, après ces mois de disette théâtrale, la comédie gracieuse et grinçante du maître italien s’avère un parfait remontant. La directrice du TNN a conçu un spectacle rapide, un précipité Goldoni (les pièces ont été judicieusement raccourcies par la traductrice Ginette Herry) qui va crescendo : le premier épisode se décline comme une farce galante ; le deuxième comme un marivaudage cruel ; le troisième comme un vaudeville diabolique à la Feydeau.

Goldoni a écrit cette trilogie en italien en 1764, deux ans après son installation en France. Voilà comme on concevait les sitcoms au XVIIIe siècle : Zelinda, une belle orpheline, et Lindoro, un jeune noble en rupture de ban, s’aiment en secret… Pour être au plus près de sa bien-aimée, femme de chambre chez un généreux patriarche, le garçon s’est fait embaucher comme secrétaire par ce dernier. Malgré de nombreux obstacles et quiproquos (Zelinda est l’objet des convoitises de l’intendant et du fils de la maison), le couple parviendra à convoler en justes noces (épisode 1). Mais pour atteindre la félicité, il lui faudra dompter ses démons : la jalousie maladive de Lindoro (épisode 2) et celle de Zelinda, sur fond de deuil et d’héritage épique (épisode 3).

Noir délire

Muriel Mayette-Holtz dirige sa troupe fringante à un train d’enfer, dans un décor sobre (quelques meubles dont un « canapé freudien », quelques vues de Nice en vidéo…) et des costumes mélangeant allègrement les époques. Le tout est rythmé d’allègres chansons. Partant d’une aimable fantaisie, le spectacle vire peu à peu au noir délire, de plus en plus mordant, surréel et drôle dans les deux derniers épisodes. En couple fusionnel, flirtant avec la dépression et la folie, Joséphine de Meaux et Félicien Juttner sont irrésistibles. Derrière leur passion dévorante, la metteuse en scène orchestre un jeu de caractères assassin (aucun second rôle n’est négligé) où s’exprime toute la palette des sentiments humains.

Mélange ravageur de farce et de mélancolie, ode tendre aux petites gens d’un peuple dont les femmes tiennent les rênes : l’essence du théâtre de Goldoni s’exprime à plein dans ce spectacle généreux qui respire-inspire la joie de revivre enfin.

 FEUILLETON GOLDONI

Théâtre

Mis en scène par Muriel Mayette-Holtz

Vu au Théâtre national de Nice le 29 mai en intégrale.

En tournée  : La Scala Paris (septembre-octobre); Théâtre de la Cité à Toulouse , Théâtre Liberté à Toulon , Théâtre de Liège (octobre); Théâtre du Jeu de Paume à Aix (novembre), La Criée Théâtre National de Marseille (décembre).

Philippe Chevilley

www.lesechos.fr

1 04/2021

Bach réunit la danseuse Kaori Ito et le pianiste Francesco Tristano | Francetv info – 01_04_21

jeudi 1 avril 2021|Catégories: Spectacle Vivant|Mots-clés: |

 Bach réunit la danseuse Kaori Ito et le pianiste Francesco Tristano dans un spectacle-performance : en accès gratuit sur le net

Une rencontre autour de Bach, un peu par hasard, réalisée au théâtre de la Scala à Paris par la danseuse franco-japonaise Kaori Ito et le pianiste Francesco Tristano.

Article rédigé par

Bertrand Renard – franceinfo-culture

France Télévisions / Rédaction Culture

Publié le 01/04/2021 10:38Mis à jour le 01/04/2021 11:15

C’est une belle rencontre entre la danseuse franco-japonaise Kaori Ito et le pianiste Francesco Tristano Schlimé, l’une improvisant sur le jeu de l’autre. Un jeu dédié à Bach mais pas seulement… Et c’est à savourer en streaming sur le site de La Scala jusqu’au 11 avril. 

On ne saura pas exactement comment ces deux-là se sont rencontrés. Cela n’a d’ailleurs aucune importance car une vraie complicité est née entre la petite danseuse japonaise (pieds nus, robe rouge à fleurs) et le ténébreux pianiste luxembourgeois.

Improvisation et complicité 

Il y a quelques semaines, dans cette salle si particulière de Paris (ancien music-hall, puis cinéma, puis cinéma porno et désormais dévolue, rénovée, à toutes les musiques), Francesco Tristano (son nom de scène) avait enregistré les Suites anglaises de Bach (à paraître) C’est en partie sur elles mais aussi sur des passages improvisés et plus contemporains que Kaori Ito a improvisé, elle aussi, sa chorégraphie.

Improvisé ou préparé, ce sont les mystères de la création. Admettons que ce spectacle-là naisse sous nos yeux. Un piano sur scène à jardin, et c’est tout : à cour la danseuse, éclairée plus ou moins, et par des lumières très jaunes qui ressemblent à des servantes, ces lampes qui restent allumées la nuit quand les théâtres dorment (et aujourd’hui, on le sait, les théâtres sont toujours dans la nuit).

Kaori Ito et Franceso Tristano (Geoffrey Roques)

Les pleins et les déliés du corps 

Quelques notes, au début. Ou pas. Des silences. Une mise en forme. Mouvements d’élongations, jambe gauche tendue, pied gauche tordu, bras droit à l’opposé. Puis changement. Des gestes, presque de mime, qui ramènent du ciel (Ito tête levée) la lune ou un poisson d’or. Ou au contraire une corde qui monte ou descend. Tristano, T-shirt noir, porte des bracelets de force, mais ils sont en éponge…

Bach. La danse peut commencer. Elle dynamise le mouvement. L’espace s’élargit, série de pirouettes, glissades vers le bas, moments de respiration en position fœtale. Et toujours cette incroyable anatomie du pied, des pieds, quasi tordus, dont on compte chaque muscle, chaque nerf. Jambe comme appuyée sur le muscle, en une sorte de grand écart qui s’interrompt, comme si Ito allait accoucher accroupie, devant nous. Les pleins et les déliés du corps. La jupe remontée pour se donner plus d’aisance, presque impudique parfois.

Kaori Ito et Franceso Tristano jouent Bach (La Scala)

Une danse sur le dos du pianiste 

Et Ito (voilà pourquoi ce sentiment de spectacle se faisant devant nous est quand même si fort), dans un moment plus fluide, moins rythmé, cherche alors à trouver un langage différent, sans forcément y parvenir. Moments de fixité perplexe où elle se réfugie sous le piano, comme si elle se disait « Qu’est-ce que tu me fais ? »

Mais justement : jusqu’alors il y avait un pianiste d’un côté, une danseuse de l’autre. Cela crée soudain entre eux une sorte de télépathie (jouée), un dialogue, même quand l’un sort de scène et l’autre pas : « T’es où ? » Il y aura d’autres moments délicieux qui ponctueront la suite de cette (petite) heure : Kaori Ito vient se blottir derrière Tristano, sur le tabouret du piano, comme s’il la portait sur son dos en jouant (on pense à cette vieille femme de La balade de Narayama qui faisait ainsi son dernier voyage dans la neige, recroquevillée sur le dos d’un fils ) et Ito, la seconde fois où elle va derrière lui, caresse ses bracelets, lui fait des petits massages des omoplates du bout des doigts, joint les siens aux doigts de Tristano, imperturbable, contemple avec intensité une partition qui n’existe pas. Instants pleins d’humour où Bach prend tout à coup une tendresse inattendue.

Tous les styles de danse passés en revue 

Tristano enchaîne alors les improvisations contemporaines aux extraits de Bach, dont la Gavotte sautillante de la Suite n° 3, moments qu’il joue avec un grand dépouillement, sans la jubilation qu’y met Glenn Gould mais avec le sens de l’énergie légère de cette musique. Ito essaie mille choses : sur un passage plus fluide, des gestes de robot, façon voguing, sur la Gavotte une sorte de chevauchée sautillante et si gracieuse.

Elle est moins bien dans le style jazzy et ils ne réussissent pas vraiment cette fausse fin où il disparaît et où elle essaie d’appeler son fantôme dans l’ombre presque complète, « T’es où » (encore) Mais alors les lampes se rallument, violentes. Elle tourne autour de la scène en poussant de petits cris, tente une danse de cour avec humour, jupe relevée…

Et, sur une très belle improvisation qui monte en nappes puissantes (Tristano composerait sans doute de formidables musiques de films ou de scène, mais y tient-il vraiment ?) Kaori Ito nous fascine une dernière fois avec des mouvements d’oiseaux, des gestes de papillons, mais accrochée au sol, avec ce pied qui lui donne son assise, entre traditions de la danse africaines et européennes. Autre chose encore. Le Japon.

Kaori Ito (danse) et Francesco Tristano (piano), spectacle sur des musiques de Bach, Tristano et improvisations. Enregistré à La Scala, Paris, le 28 mars. En streaming sur le site de La Scala jusqu’au 11 avril

16 02/2021

Francesco Tristano, seul en salle à la Scala | Libération 11-02-21

mardi 16 février 2021|Catégories: Spectacle Vivant|Mots-clés: |

Musique

Rencontre avec le pianiste aux idées longues, qui enregistre son prochain album accompagné de son seul ingé son dans une Scala Paris désertée. Le quasi-quadra sera en concert en streaming samedi soir. 

par Guillaume Tion

publié le 11 février 2021 à 20h18

Des clémentines, des amandes, du café et trois radiateurs. Un exemplaire de l’Infinie comédie de David Foster Wallace posé sur le sol et des partitions de Frescobaldi sur le piano Yamaha à la caisse striée par des fils de micro. Une grande salle vide à disposition pour la semaine et un ingénieur du son compagnon de route de longue date. Voilà le contexte de l’enregistrement du prochain album de Francesco Tristano. Titre provisoire : On Early Music«J’aurais voulu Early Music, mais il y a aussi des morceaux contemporains», sourit-il. Ses morceaux. Comme s’il ne pouvait s’empêcher de laisser ses impressions de voyage à travers les genres et les siècles parcourir le disque. Depuis une vingtaine d’années, le pianiste né au Luxembourg et résidant à Barcelone coche toutes les cases. Interprète plébiscité qui s’associe à de grands orchestres internationaux pour des ouvrages du répertoire classique. Compositeur diplômé de la Juilliard School qui accumule les disques. Vigie tournée vers le passé avec les deux mains plantées dans la musique électronique, comme une évidence pour celui qui considère que les sons synthétiques ou l’imperturbabilité d’un beat font partie de la construction culturelle des musiciens, classiques ou non. Mais aujourd’hui, la roue tourne pour l’élégant quasi-quadra : «C’était le moment pour moi de revenir aux fondamentaux. Du pur piano.»

De fait, pas d’invité pour ce disque, pas de fantaisie non plus. Mais un programme panaché, passé-présent, qui intercale cinq de ses nouvelles œuvres entre celles de compositeurs baroques, de John Bull à Girolamo Frescobaldi ou Orlando Gibbons. Tristano voit un lien évident entre les œuvres baroques et la musique contemporaine : «Dans le rythme, presque groove, par le caractère dansant des pièces, mais aussi par une certaine liberté harmonique née de l’approche modale», analyse-t-il en joignant ses deux mains comme pour appuyer sa pensée. Et Tristano de rappeler ensuite des points communs entre Frescobaldi et Boulez, dans leur manière d’inciter les interprètes à s’emparer pleinement de leur œuvre, rejouer ou sauter certains passages, sans respecter un format rigide. Pour lui, toute interprétation baroque, même sur instrument d’époque, tombe de toute façon à côté : «Nous n’avons pas dans l’oreille et dans la culture l’importance que les auditeurs et les compositeurs apportaient à une chaconne ou une bourrée.»Libre à lui alors de s’informer pour s’en approcher au plus près, ou au contraire de transformer certaines pièces. Puis il s’assied au piano et livre une toccata de Frescobaldi, sans crescendo ni usage de la pédale, qui sera enregistrée d’un seul tenant, s’interrogeant avec l’ingé son sur la façon de sortir de certaines trilles – les partitions baroques, non annotées, permettant précisément cette liberté à l’interprète.

Grappe de pièces électroniques gonflées de pulpe nipponne

Sur scène ce jour-là, il enregistre aussi une toccata qu’il a composée. Etonnant d’entendre un de ses morceaux filer à vive allure, notamment lors d’une partie dont l’esprit est tourné vers la fugue mais dont le son s’implante dans un staccato machinique qui joue à cache-cache avec un click. D’ordinaire, les morceaux composés par Tristano étirent des ambiances lentes, où l’introspection de l’auditeur et de l’artiste insomniaque peuvent dialoguer tranquillement et se promener dans des décors de toutes matières. «Gould disait que la lenteur apporte la profondeur. Je suis d’accord, mais en partie, car le rythme est important.» Pendant l’enregistrement ardu de cette pièce, Tristano reprend sa partition, ajoute des altérations, réécrit au crayon sur les pages au milieu d’une jungle de huit micros. Liberté encore de retoucher son propre travail.

Il est à la Scala comme chez lui. Le piano de concert sur lequel il travaille, c’est d’ailleurs lui qui l’a choisi, avec Bertrand Chamayou, à Hambourg, avant l’ouverture de la salle, en 2016. Les propriétaires, Mélanie et Frédéric Biessy, chouchoutent leur artiste et Tristano le leur rend bien. L’an dernier, il a joué à la Scala sa seule date parisienne des Tokyo Stories, grappe de pièces électroniques gonflées de pulpe nipponne, sur fond d’installation vidéo. Aujourd’hui, la Scala confinée est aussi associée à ce nouvel album : Tristano y présente ce samedi un concert où il interprétera pièces baroques et certains de ses nouveaux titres. Enregistré dans l’après-midi à huis clos, il sera diffusé à 20h30 sur le site de la salle. Le pianiste retournera ensuite à son immersion du moment, les Suites anglaises de Bach, impatient de retrouver des salles rouvertes et du public, peut-être au Japon. «Je pense qu’on en a pour cinq ans avant un retour à la normale», conclut-il, fataliste.

Francesco Tristano en concert, sur le site de la Scala, ce samedi à 20h30.

www.liberation.fr

15 10/2020

Un petit amphithéâtre, mais de grandes ambitions pour la Piccola Scala | Le Figaro 14-10-20

jeudi 15 octobre 2020|Catégories: Spectacle Vivant|Mots-clés: |

 

À Paris, la Scala a inauguré une salle de 200 places dédiée à la création et à la prise de risque artistique. Un pari qui ne manque pas de sel.

Par Philibert Humm

Publié hier à 18:04, mis à jour hier à 18:20

La Piccola Scala sera dédiée à la création, à l’émergence et à la prise de risque. Alexei Vassiliev/La Scala

De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace et les théâtres seront peut-être sauvés. Tandis que la plupart des directeurs de salle de spectacle craignent le pire, Frédéric Biessy, qui dirige la Scala sur les boulevards parisiens, inaugure une nouvelle salle. Petite, certes, – moins de 200 places – mais une salle tout de même.

Nous avons fermé six mois et on a résisté. Nous n’avons plus peur

Frédéric Biessy, directeur de la Scala

La Piccola Scala, située huit mètres et quarante marches sous le niveau du sol, vient d’être livrée. Elle sent encore la peinture et l’acoustique reste à revoir. Plus préoccupant, à l’heure où nous écrivons ces lignes, nous ne savons pas si elle sera autorisée à recevoir du public. On fait dans le doute comme si de rien n’était. Les programmes ont été imprimés et distribués aux journalistes. La Piccola sera dédiée à la création, à l’émergence, à la prise de risque.

S’agit-il en la circonstance d’audace ou d’inconscience? Les deux mon capitaine, répond tout feu tout flamme Frédéric Biessy. «Avez-vous entendu parler d’un seul théâtre privé ayant déposé le bilan? Pour l’instant non, nous tenons. Grâce aux aides d’une part – il faut le reconnaître – et grâce au public d’autre part, qui répond présent pour autant qu’on le lui permette. Nous avons fermé six mois et on a résisté. Nous n’avons plus peur

Programmation musicale

Mercredi matin, boulevard de Strasbourg, ont répondu présent Jason Brokerss, stand-upper qui essuiera les plâtres de la Piccola, et quelques autres jeunes auteurs. Rodolphe Bruneau-Boulmier est là lui aussi, qui assure la programmation musicale. Les 13 de chaque mois, un ou une concertiste donnera ici un récital. Ce 13 octobre, Josquin Otal ouvrait la danse en interprétant Brahms, Ravel, Rachmaninov et Thomas Adès.

« Nous demandons aux musiciens d’incorporer à leur programme au moins un compositeur vivant. C’est la seule et unique contrainte imposée.» Dans ce petit amphithéâtre de bois, le public disposé en arc de cercle se retrouve à quelques mètres à peine du musicien. Un piano a été pour l’occasion affrété de Hambourg. «Le grand-queue de la grande salle ne convenait pas, explique Bruneau-Boulmier. Trop puissant. C’aurait été faire rouler une Ferrari sur un chemin de terre…»

Ce genre d’endroits manquait à Paris. Les spectateurs n’attendent que ça

Frédéric Biessy, directeur de la Scala

Frédéric Biessy, en ce qui le concerne, n’est pas peu fier de son chemin de terre. Comédiens, penseurs, compositeurs, humoristes, philosophes… à l’entendre, la Piccola sera le sillon où germeront les futurs grands. « Ce genre d’endroits manquait à Paris. Les spectateurs n’attendent que ça.» Il y a décidemment chez cet homme de l’espoir. Et comme dit l’autre, où il y a de l’espoir, il y a de la vie.

La Scala, 13 boulevard de Strasbourg (Paris 10e).

www.lefigaro.fr